par G. Donguy
L’Acu-AnMo n’est pas une "simplification", ni un "concept", mais un retour aux sources : le diagnostic est 100% Traditionnel. Ce sont beaucoup de notions que les Chinois contemporains ont cependant perdues, à cause principalement des événements politiques des 19e et 20e siècle : interdictions de la MTC, guerres, civiles et contre les japonais, maoïsme : la transmission orale de Maître à élève a été interrompue, et ne restent que des textes, écrits qui sont surtout des commentaires de ce qui est censé être connu mais qui ne l’est plus.
Ainsi l’acupuncture contemporaine en Chine est basée sur des raisonnements inutilement complexes, et vains puisque cela n’aboutit qu’à des recettes : celles-ci comportent de nombreux points, dont on ne sait pas très bien ce que chacun censé faire, points finalement proposés en fonction de la seule localisation de la douleur (douleurs de l’épaule : utilisez tels et tels points ; douleurs du genou : tels points, etc.), et finalement modérément efficaces.
En France cependant l’Acupuncture a été transmise au début du 20e siècle, avant que la Tradition ne se perde complètement, grâce à Soulié de Morant, diplomate et interprète dans le sud de la Chine. Cette Tradition a été maintenue vivante par des générations d’excellents acupuncteurs, comme le Dr Kespi, qui ont su retrouver et conserver ce qui commençait déjà à se perdre.
C'est pourquoi en France sont encore utilisées des notions énergétiques, (comme les Barrières, etc) que les Chinois, donc la majorité des écoles occidentales, qui les copient, quant à eux ne semblent plus comprendre.
L’Acu-AnMo se situe dans la Tradition : pas de recettes, mais un diagnostic purement énergétique (ce qui n’est finalement pas si compliqué…), et le point à traiter est choisi parce que son action énergétique est connue et correspond au diagnostic. Le soulagement immédiat de la douleur doit d’ailleurs confirmer le bon choix du point à traiter.
Le terme AnMo signifiant simplement que ces points sont travaillés en douceur : avec un simple stylet (l'aiguille à bout rond citée dans les textes anciens), manipulé de façon spécifique et totalement indolore pendant une minute, pas plus, et donc pas par une aiguille laissée en place. Le stylet permet ainsi, contrairement à l'aiguille, de répéter la stimulation d'un même point, tant qu'on constate une amélioration de la douleur du patient (testée après chaque stimulation), ce qui améliore grandement la vitesse et l'efficacité du traitement.
Les Moxas sont souvent utilisés, ce que la plupart des acupuncteurs ne font que rarement : or la traduction du mot chinois utilisé pour décrire l’acupuncture signifie "aiguilles et moxas". Car les moxas sont le seul moyen d’apporter de l’énergie en cas de Vide : or on ne peut pas faire circuler harmonieusement une énergie insuffisante.
Pour être complet, précisons que l’Acu-AnMo ne s’adresse qu’aux douleurs de l’appareil locomoteur. Et le principe de base est que toute douleur est due à une obstruction à la circulation de l’énergie.
La théorie des méridiens n’est pas systématiquement utilisée en Acu-AnMo. En effet toutes les médecines Traditionnelles, y compris donc la MTC, utilisent un raisonnement Analogique, c’est-à-dire purement mnémotechnique, pour, à partir d’un symptôme bien concret, arriver à un traitement bien concret, au moyen d’un raisonnement qui lui ne l’est pas, mais qui cependant est parfaitement reproductible par des thérapeutes compétents différents avec des résultats semblables (ce qui est le critère d’une méthode scientifique).
Par exemple la notion de Barrage sur la circulation énergétique, de Stagnation d’énergie, etc. ne sont que des concepts, mais ils sont bien définis, de telle sorte que chaque thérapeute doit arriver au même diagnostic énergétique, qui aboutit au même choix de point(s) à traiter en fonction de ce diagnostic.
Pour en revenir à la circulation de l’énergie, ce n’est donc qu’une représentation imagée de quelque chose dont on ne constate que les effets, un référentiel analogique, un système mnémotechnique, qu’on utilise selon les besoins, tout comme le référentiel des méridiens. Dans le cadre de ce concept, l’énergie circule dans les deux sens au niveau des méridiens, lesquels n’ont donc pas de direction (la numérotation des points en Occident donne une fausse impression de direction : les Chinois n’utilisaient que les noms des points). Mais si on utilise le référentiel des points WuShu, on raisonne de la périphérie vers le centre, quel que soit le méridien.
On n’utilise le référentiel analogique des méridiens que quand ceci est utile au diagnostic. Ce qui fait que dans le 2/3 des diagnostics, la notion de méridien n’est pas utilisée. C’est le cas par exemple des Barrières : on va utiliser un autre référentiel mnémotechnique, qui est qu’à chaque grosse articulation il y a un courant Yin centrifuge, un courant Yin centripète, et de même deux flux Yang, centrifuge et centripète. Ceci correspond à la réalité constatée et la résume.Un barrage sur un de ces flux provoque une douleur, mais la levée spécifique de chacun des 4 barrages potentiels, l’ouverture de chaque écluse intempestivement fermée, implique des points différents, d’où l’importance d’un diagnostic précis. Et l’utilisation de ce référentiel analogique des 4 flux permet un diagnostic parfaitement reproductible et un traitement immédiatement efficace.
Tradition orientale et occidentale ne sont que des points de vue analogiques sur la même chose, points de vue simplement colorés par la culture locale.
Donc l’une peut aider à mieux comprendre l’autre.
En l’occurrence, la notion d’énergie dite "perverse" n’est pas très compréhensible, ni utilisable analogiquement pour un traitement efficace, alors qu’il suffit de reconsidérer le rôle des facteurs climatiques dans les maladies d’un autre point de vue. Ceci est expliqué dans mon livre et dans mes cours : c’est un peu long pour en discuter en détail ici.
L’examen de la langue et du pouls n’apporte absolument rien qu’un bon interrogatoire ne puisse facilement diagnostiquer.
Les pouls sont très compliqués à prendre, et sont d’énormes sources d’erreurs. Voici une anecdote véridique : après la fin de mes études de médecine et d’acupuncture, nous avons créé avec d’autres médecins une association qui un jour a fait intervenir un spécialiste chinois des pouls. Il nous a fait nous asseoir en ligne, nous demandant de ne pas lui dire nos symptômes, qu’il allait les trouver en nous prenant le pouls. Résultat : il s’est trompé pour tout le monde. Je me suis dit que si un spécialiste chinois n’y arrivait pas, il y avait peu de chances que j’y arrive…
Depuis je ne prends plus les pouls, et je m’en passe très bien.
De toute façon le système des pouls est adapté au raisonnement sur les 12 viscères, lui aussi inutilement complexe et donc d’assez peu d’intérêt, d’autant qu’il aboutit en général à des recettes: on peut donc se demander à quoi cela peut bien servir…
Le raisonnement des médecines traditionnelles étant analogique et mnémotechnique, ce qui contrairement aux apparences est bien concret, le fait que les méridiens existent ou pas est sans importance ; d'autant que nous parlons ici d'énergie, sans forme et non mesurable avec des appareils, et non de matière : or pour l'Occident 'exister' c'est toujours de la matière quantifiable.
Les points existent bel et bien, sinon il n’y aurait pas de résultats, mais ils ne sont pas matériels, plutôt comme des commutateurs d’énergie.
Quant aux méridiens, qu’il s’agisse d’un concept ou d’une réalité… ce qui compte, et ça c’est évidemment bien concret, c'est qu'à partir de l'observation des symptômes on aboutisse facilement et rapidement à un traitement simple et efficace, et c’est le cas en Acu-AnMo.
On se sert souvent des méridiens, on s'en passe souvent, ils ne sont qu'un moyen diagnostique énergétique, utiles dans certains cas, et pas dans d'autres.